Interview d'Amar Mostefaoui, auteur de la pièce Tatropd'lachance

/ Interview - écrit par jaiina, le 23/08/2012

Tags : theatre mise mostefaoui scene naissance seine spectacle

Amar Mostefaoui, l’auteur de la pièce Tatrod'lachance (cf. critique), nous a fait la gentillesse de répondre pendant une heure à nos questions concernant la pièce et plus généralement sur le métier d’auteur de pièces de théâtre :

Krinein : Bonjour M. Mostefaoui, pouvez-vous vous présenter rapidement ?

Amar Mostefaoui : J'ai un passé un peu atypique : j’ai 53 ans et fais du théâtre depuis l’âge de 8 ans. J’ai fait de la comédie musicale dans les années 70 et j’ai travaillé ensuite dans les années 80 avec Gérard Louvin (chanteur dans un groupe de jeunes garçons). Et après je suis retourné à mes premières amours, le théâtre. Le théâtre amateur m'a apporté beaucoup car c’est l’art de faire beaucoup de choses avec finalement peu de choses. On doit s'adapter aux différents lieux, imaginer des mises en scène avec peu de décors et de costumes, travailler avec des comédiens amateurs qui n’ont pas tous la même implication… c’était très enrichissant. Puis tout a véritablement commencé en 2005 lorsque j'ai repris la mise en scène de Un petit jeu sans conséquence pour une centaine de représentations, et dans laquelle je jouais également. J’ai également monté le Baiser de la Veuve d’Israel Horovitz, Pour la Vie ? de Lilian Loyd, Vos 2 vils un montage déjanté de Feydeau et Courteline. Et en 2010, j’ai commencé l’écriture de Tatrod’lachance dont la première a eu lieu le 9 août 2012.

En résumé, je suis à la fois metteur en scène, comédien, auteur et producteur.

K : Commençons par la pièce, où avez-vous puisé votre inspiration pour l’écrire ?

A.M : Elle est venue de manière assez naturelle : pour moi, il y a deux grands phénomènes dans notre société : le divorce et Internet. Qui dit divorce dit mère célibataire, qui dit Internet dit rencontres. L’idée était de voir comment tout ça faisait « bon ménage », de manière légère, d’où l’idée du personnage de Bernard, un peu lunaire mais central dans la pièce. Et mon passé de consultant par ailleurs explique certaines choses de l’histoire.

K : Pourquoi avoir choisi une femme en tant que personnage principal de la pièce ?

A.M : J'ai eu une mère, cinq sœurs, une ex-femme, une fille et aujourd’hui une compagne que j’aime et qui m’inspire énormément. Mes meilleures amies sont des femmes, je me sens plus à l'aise dans un milieu féminin et je trouve que les femmes sont moins sentimentalement pudiques que les hommes, c’est principalement ce qui m’intéresse. D'où le personnage d’Hélène dans la pièce qui se livre plus que les autres.

K : Qu’avez-vous mis de personnel dans la pièce ?

A.M : Je connais bien le monde des consultants (pas forcément dans ces mêmes finalités) et j’aime la dérision. Également celui des femmes comme Hélène, qui ont des enfants, qui recherchent l’amour et qui ont du mal à trouver des hommes qui assument les enfants. Concernant Lisa, j'ai eu une fille de 26 ans donc… j’ai « donné ». Et le personnage de Bernard est un peu un ange, c’est le bon copain, qu’on connaît tous un peu. La pièce rassemble des gens qui m’intéressent.

K : Dans les deux pièces on assiste à une remise en cause du couple…

A.M : Dans un petit jeu sans conséquence, je ne suis que le metteur en scène et c’est l’originalité de l’idée qui m’a intéressé. Maintenant, il est vrai que notre préoccupation à tous est de réussir notre vie amoureuse. Ce qui me paraîtrait même aberrant est de voir une pièce qui ne parlerait pas des relations hommes/femmes d’une façon ou d’une autre. C’est un thème que j’aime, que je voulais traiter de manière originale et qui offre encore beaucoup de possibilités. Je voulais sortir du cadre de beaucoup de pièces d’aujourd’hui qui tournent autour des problématiques de trentenaires. Une chose m’a beaucoup touchée : à la fin de la deuxième représentation, une maman est venue me voir et m’a dit : « vous avez écrit ma vie mais pour la première fois, elle m'a fait rire ».

K : La pièce évolue t elle en fonction du retour des comédiens, du public ?

A.M : Très peu. J'écris ce que j’ai envie d’écrire, pas forcément pour fédérer. Après si la pièce plait, j’en suis évidemment très heureux. Mais je ne souhaite pas réorienter mon écriture pour plaire au plus grand nombre. Mon principal objectif est de me faire plaisir, je sais, c’est totalement égoïste, mais j’assume. Actuellement, les premiers retours montrent que le public adhère (enfants, ados, parents) et j‘en suis ravi. De même, il n’y a pas d’improvisation car la pièce est assemblée comme un puzzle et improviser mettrait en péril la structure de la pièce.

K : Comment s'est opéré le choix du casting ?

A.M : J’ai écrit le rôle d’Hélène pour Béatrice Darmon, son choix s’imposait donc ! J’ai vu Julie Wingens dans une pièce avec Arthur Jugnot (Chat en poche) il y a 2 ans et pour moi, c’était elle. Elle m’a ensuite présentée Olivier Ruidavet avec qui elle a travaillé et j’ai vu Renaud Castel dans une pièce, Happy Bad Day. Et idem, c’était lui. Je suis très content de la distribution car les comédiens se sont appropriés la pièce et ont su trouver un équilibre, si bien que je me demande si je n’ai pas écrit la pièce pour eux.

De plus, ils chantent et dansent tous, d’où la raison de passages chantés dans chacune de mes pièces… la musique c’est aussi la vie.

K : Quel est votre prochain projet ?

A.M : J‘écris un spectacle musical, ma grande passion. J’ai envie d’une histoire qui parle de musique et pas l’inverse. Je souhaite écrire des choses simples, gaies et où les comédiens s’amusent.

K : Parlons désormais plus généralement du rôle d’auteur et de l’écriture : comment écrit on une pièce de théâtre ? Y a-t-il des astuces ?

A.M : J’avais une histoire dans la tête, avec un début, un milieu et une fin et je me suis amusé à faire vivre les personnages sur une heure et quart. J’avais deux fils conducteurs : que la pièce me touche et me fasse rire. Je n’ai pas de méthodologie, je voulais juste raconter une histoire.

K : Comment arriver à trouver un compromis entre avoir une histoire un peu profonde tout en restant sur le registre comique ?

A.M : On a tous des gens dans notre entourage qui nous font rire, et ce sont généralement des gens qui ont beaucoup de profondeur. Pour faire rire les gens lors d’une conversation, je trouve qu’il faut beaucoup d’intelligence et de profondeur. Bernard est un personnage qui fait beaucoup de rire mais en même temps, il a un cœur en or, on éprouve une vraie sympathie pour lui. Le compromis vient de manière naturelle. Après, tous les personnages n’ont pas le même niveau de sensibilité (Janus, par exemple).

K : Pourquoi ne pas avoir mis en scène la pièce et/ ou ne pas jouer dedans ?

A.M Je ne le souhaitais pas. Lorsque j’ai écrit la pièce, j’ai tout vu dans ma tête, le jeu des comédiens, la mise en scène et je ne voulais pas me brider. Cela n’aurait été que restituer ce que j’avais écrit. Ici, Richard Taxy a apporté un œil neuf sur la pièce qui lui a donné sa fluidité. Le soir de la première, j’ai vraiment découvert le spectacle. Il y a eu naturellement des débats mais je tenais aux fondamentaux : Hélène devait être Madame tout le monde, je ne souhaitais pas que Bernard soit un boulet mais un garçon lunaire, gentil, je souhaitais également que la relation mère/fille soit tendre. Je ne voulais pas d’une pièce méchante, ce qui ne l’empêche pas parfois d’être caustique ou cynique. Nous avons deux modes de travail différents Richard et moi : il est habitué à monter de grosses productions en prenant du temps alors que je peux monter des pièces en 2/3 semaines. Ces deux approches se complètent et s’enrichissent mutuellement. J’aime travailler dans l’urgence. J’ai écrit la pièce très rapidement : en durée, un an, mais j’ai écrit les deux premiers tiers en une semaine et la fin en trois jours. J’ai rajouté une scène en une heure après une lecture. Mais il s’est passé presque dix mois entre les deux premiers tiers et la fin car je bloquais sur une phrase. Huit mois plus tard, j’ai retiré cette phrase et la pièce s’est débloquée.

K : Quelles sont vos influences ? Avez-vous l’occasion d’aller au théâtre ?

A.M : Je suis sur scène trois soirs et les trois autres soirs, je vais voir la pièce, du coup, en effet, ce n’est pas évident. J’ai beaucoup lu de pièces de théâtre, plus que je n’en ai vu. Je suis également influencé par la vie de tous les jours, les personnes que je rencontre.

K : quel est votre dernier coup de cœur théâtral ?

A.M : Le porteur d’Histoire, que j’ai vu au Festival d’Avignon au théâtre des Beliers et qui sera au théâtre 13 à la rentrée, une pièce extraordinaire, dont je suis jaloux ! Un grand travail de recherche au niveau du texte, de la mise en scène, de l’interprétation. Un très grand moment de théâtre. Mon coup de cœur de ces deux dernières années.

J‘en profite pour préciser que Un petit jeu sans conséquence se jouera le 22 Septembre pour l’inauguration des Théâtre de Béliers Paris, Théâtre géré par Arthur Jugnot et son équipe, une bande de « fous furieux » amoureux du Théâtre et tous plus attachants les uns que les autres.

K : enfin, pour finir, quels sont vos futurs projets ?

J’en ai 4 :

  • Essentiellement que Tatrod’lachance fasse son bout de chemin ;

  • Une pièce que je souhaite écrire en septembre avec un ami ;

  • Monter un spectacle pour enfants et qui parlerait également aux parents ;

  • Ecrire le spectacle musical que j’ai évoqué plus haut.

Mais pour le moment, je souhaite réellement me concentrer sur Tatrod’lachance, la porter le plus loin possible, c’est une pièce qui me tient beaucoup à cœur, c’est mon bébé.

 

Et, Offre Exceptionnelle pour les lecteurs de Krinein !!!

Afin que vous puissiez vous aussi également découvrir cette pièce, Krinein et Amar Mostefaoui vous proposent de bénéficier de tarifs préférentiels:

- Au moment où vous réservez auprès du théâtre des Feux de la Rampe au 01 42 46 26 19, précisez que vous venez de la part de Krinein et vous pourrez bénéficier de places à 11€ au lieu de 13€.

 

- Et surtout, pour les 5 premiers à montrer de l'enthousiasme et de l'envie, Amar Mostefaoui vous offre vos places. Réagissez à l'interview, précisez quel jour vous souhaitez assister à la pièce et hop, vous pourrez y aller avec la personne de votre choix (5x2 places offertes, pas mal, non ?). Attention, les places sont limitées, dépêchez vous ! Je vous enverrai un mail de confirmation par MP à présenter au théâtre.

En échange de ces services rendus, un petit commentaire post spectacle serait fort sympathique! :)