Seuls - Wajdi Mouawad

/ Seuls - Wajdi Mouawad (voir la critique Krinein)

Cela pourrait être n’importe qui et c’est bien là la douleur. Et c’est comme pour tout le monde qui, se réveillant chaque matin et se regardant dans la glace, pense : « cela pourrait être n’importe qui ». Et la vie, comme une énigme, joyeuse ou malheureuse, la vie engluée dans un temps trop linéaire, comme une flèche. Cela pourrait être n’importe qui. Il pourrait s’appeler n’importe comment. C’est ce que, du moins, il pense, lorsqu’on lui demande son prénom : « comment vous appelez-vous ? » - Je m’appelle Harwan, mais ça n’a aucune importance et je pourrais bien m’appeler n’importe comment, comme n’importe qui. C’est comme ça. Ce n’est rien. Harwan, un étudiant montréalais d’une trentaine d’année, sur le point de soutenir sa thèse, se retrouve, suite à une série d’événements profondément banals, enfermé une nuit durant dans une des salles du Musée de l’Hermitage à Saint-Pétersbourg. La nuit sera longue. Elle durera plus de deux mille ans et l’entraînera, sans qu’il ne puisse s’en douter une seconde, au chevet de sa langue maternelle oubliée il y a longtemps sous les couches profondes de tout ce qu’il y a de multiple en lui. Je m’appelle Harwan.»