Rock en Seine - 20 août 2008

/ Compte-rendu de concert - écrit par nazonfly, le 26/08/2008

Tags : rock seine festival paris scene concerts musique

Rage Against The Machine, un groupe culte pour l'édition 2008 de Rock en Seine. Review d'un concert forcément exceptionnel.

Est-il besoin encore de présenter Rage Against The Machine ? L'un des principaux groupes du milieu des années 90 a su fédérer des millions de personnes derrière un savant mélange d'une fusion percutante et marquante avec un indémodable premier album (seize ans déjà !), et un engagement d'extrême gauche idéal pour une jeunesse en pleine rébellion (ils auront largement repopularisé l'imagerie de Che Guevara). En 2000, après 3 albums (plus un CD de reprises et deux lives), c'est pourtant le choc. Rage Against The Machine s'arrête, laissant des fans dégoûtés de n'avoir pu les voir en live, ne se consolant qu'à peine avec les extraits de concert.

2007 c'est l'espoir. Le groupe recommence à faire parler de lui et entame une série de concerts mondiaux. L'année 2008 s'annonce fameuse pour la France avec deux concerts, à Paris Bercy en juin et le 20 août dans une première journée de Rock en Seine, avancée d'une semaine par rapport au reste du festival (accueillant notamment Amy Winehouse, R.E.M. ou Tricky). Une date assurément immanquable !

Ratm-man
Ratm-man
Pour qui ne connaît pas le Parc de Saint Cloud, où se déroule le festival, c'est une véritable surprise. A peine débarqués par le bus au milieu des immeubles et du béton, à quelques pas de la Seine et aussi du "paquebot" du Front National, les festivaliers sont guidés par les forces de l'ordre et s'enfoncent sous le bitume. Quelques minutes et un tunnel plus tard, une oasis de verdure s'ouvre devant nos pas, coincée à quelques mètres du périphérique. Etonnant et déroutant. Les pelouses se glissent entre les marronniers, les toilettes et les stands boisson et nourriture se succèdent aux sculptures rappelant Versailles. Arrivés en avance, nous croisons Tiken Jah Fakoly, Nick Cave, Keith Jarrett ou encore Bertrand Cantat... dans une expo photo de Youri Lenquette. Une belle façon de commencer cette journée ! Plus loin, des créations de M.U.R. ornent une allée d'arbres tandis que les étoiles rouges se multiplient sur les T-shirts dans une ironique uniformité. Enfin, nous sommes devant la Grande Scène qui paraît minuscule au bout d'une immense pelouse. Trente mille personnes sont attendues ce soir devant Blood Red Shoes, Lostprophets, Mix Master Mike et surtout Rage Against The Machine.

Rock en scène
Rock en scène
Ce sont les Blood Red Shoes qui ouvrent la scène. Un duo presque improbable avec Steven Ansell à la batterie et Laura-Mary Carter à la guitare, les deux chantant tour à tour. Inscrits parfaitement dans la mouvance rock actuelle, les Blood Red Shoes nous propose une musique sympathique et qui fonctionne bien, sans franchement convaincre complètement. A vrai dire, nous ressortirons un poil déçu de ce set qui sera pourtant le meilleur des trois premières parties. Et de loin !
Après une pause sandwich avancée histoire d'être en forme pour le concert de Rage Against The Machine, nous nous postons loin de la scène pour regarder d'un oeil second le concert des Lostprophets. Et que dire sinon que ce n'est pas très bon ? Un chanteur Tokio Hotel like avec le charisme d'une huitre avariée et encore fermée, un chant grave souvent interrompue par des 'ouhou' autant à leur place qu'un T-shirt pro-Bush à la Fête de l'Huma, une musique convenue oscillant entre neo-metal et rock qui ferait passer Britney Spears pour un monstre d'originalité. Dire qu'en 4 ans, ils auront réussi à faire l'ouverture de Metallica au Parc des Princes et celle de Rage à Rock en Seine. Un véritable exploit pour un groupe mauvais sur scène et dont les albums sont presque confidentiels !

Le troisième larron des premières parties s'appelle Mix Master Mike, à savoir le DJ des Beastie Boys. Un monument qui promettait beaucoup... sur le papier. Dans les faits, le concert n'est vraiment pas intéressant. Imaginez que vous zappiez à la radio avec un mec à côté de vous qui scratche et lance de temps à autres quelques « Mix Master Mike », et vous aurez une bonne idée du concert. Les Nirvana, Queen, White Stripes s'enchaînent sans aucun fil directeur, et le public ne s'enthousiasmera franchement que sur les bouts laissés tels quel de Smells Like Teen Spirit, Bohemian Rhapsody ou Seven Nation Army. Décevant du début à la fin.

Celle-ci n'est pas de Belgrade
Celle-ci n'est pas de Belgrade
Heureusement ces premières parties d'une qualité vraiment moyenne ne nous refroidiront pas pour LE concert événement de cette année 2008 pourtant riche en concerts. Les Rage Against The Machine se paieront le luxe de débuter avec plus de dix minutes de retard dans une ambiance d'attente sensible. Tout à coup, une sirène retentit, annonçant l'arrivée du groupe en tenue de prisonniers de Guantanamo et cagoulés. Ils se tiennent droit comme des i sur la scène, sans un mot avant qu'on vienne les placer à la batterie, au micro et qu'on leur donne les guitares. Dès les premières notes de Bombtrack, tout le monde se met à chanter, à crier et à sauter sur place. Le son est parfait. Même à quelques mètres de la scène, on peut se passer de bouchons d'oreille et pourtant on entend bien au fond du public ! L'ambiance est formidable, et tandis que le groupe se change, une gigantesque étoile rouge se dresse. Il est temps pour nous de fendre la foule pour tenter de nous poster aux avant-postes. Evidemment la fosse est séparée en deux par un large espace vide, on sait jamais, si les gens pogotaient ! Plusieurs minutes seront nécessaires pour atteindre les premiers rangs, au son de Testify. Pas de pogos pour les premiers titres, mais plutôt d'énormes vagues humaines qui chahutent le public d'arrière en avant, et d'avant en arrière. Aucun répit n'est accordé (People of the sun, Bulls on parade, Know your enemy, Vietnow) jusqu'à un fantastique Bullet in your head qui mettra tout le monde à genoux. Un titre calme inconnu au bataillon permet au coeur de redescendre et au public de découvrir une autre facette de Rage, plus bluesy mais toujours aussi bonne.
Le concert reprend, si on peut dire, avec Born of a broken man et les jambes reprennent leur mouvement. De haut en bas, de gauche à droite, d'avant en arrière. Petit à petit, de véritables pogos se forment, délivrant une énergie positive impressionnante. Pour clore le concert, après Calm like a bomb, Guerilla Radio, Sleep now in the fire, War within a breath, c'est l'Internationale version russe qui retentit, reprise en français par la foule, le poing levé. Le communisme n'est apparemment pas mort ! La foule est chaude pour rappeler le groupe qui terminera par ce qui sera tout simplement le sommet du set : Freedom suivi de Killing in the name. « Fuck you I won't do what you tell me », scandera la foule à l'unisson, le doigt levé, dans un ultime mouvement. Les quelques personnes qui demanderont Wake up ne seront pas satisfaits, car le concert est terminé laissant d'admirables souvenirs et quelques bleus.


Bye Bye Saint Cloud
Bye Bye Saint Cloud
Comme le dira quelqu'un dans la queue pour obtenir une eau salvatrice, « on a vu Rage Against The Machine, on peut mourir tranquille. » Sans être aussi extrémiste et même si on pourra peut-être regretter que les titres aient été joués sans presque aucune variation par rapport à l'album (mais en ont-ils franchement besoin ?), le concert de Rage Against The Machine aura été un putain de grand moment !

Dans quelques jours, le reste de Rock en Seine envahira le Parc de Saint Cloud pour des concerts on l'espère aussi bon que celui-ci !