Musée du Quai Branly
Sortir / Critique - écrit par nazonfly, le 06/01/2009 (Tags : musee branly quai paris jacques visite chirac
Le Musée du Quai Branly est l'occasion de découvrir ces cultures parfois oubliées du reste du monde, surtout par l'Occident qui les a pillées sans vergogne des siècles durant.
Que fait un provincial quand il monte sur Paris voir un concert ? Il essaie d'en profiter pour visiter un musée ou deux. Le concert de Metallica en 2004 aura été l'occasion de faire le tour du Louvre. Le concert de Rage Against The Machine, quatre ans plus tard, sera accompagné d'une visite du Musée au Quai Branly, dédié à ce que Jacques Kerchache appelait les arts premiers.
Art, culture ou design ?
© musée du quai Branly photos Arnaud BaumannRappelons nous que le Musée avait été inauguré en grandes pompes par Jacques Chirac le 20 juin 2006 en présence notamment de Kofi Annan. Pourtant de nombreuses polémiques avaient accompagné son ouverture : la principale portant sur cette appellation d'art premier. Des polémiques qui ne peuvent qu'accompagner la visite de ce musée.
En effet, il est légitime de se poser la question connue par tous les lycéens de terminale : qu'est-ce que l'art ? Car ici les pièces exposées ne sont pas, pour la plupart, des objets seulement artistiques, destinés à la décoration, mais des objets utilisés quotidiennement, ou en tout cas régulièrement par les peuples des cinq continents. On peut, par exemple, admirer de superbes chambranles de porte, des projecteurs de lances et de sagaies savamment sculptés. De cette façon, le Musée du Quai Branly pourrait être pensé comme une rencontre entre l'art et l'objet, ce qu'on appelle communément aujourd'hui le design. A côté de ces objets quotidiens, on retrouve de nombreux objets de culte, comme les totems (le totem de l'ours est tout simplement une pièce magistrale qui ne peut que rester gravé dans la mémoire du visiteur), les maisons des hommes destinées à l'initiation ou les différents tambours. Au final, a-t-on affaire à de l'art, du design ou de la culture ? Sûrement un peu des trois, la vocation du Musée semblant surtout être de regrouper des objets des peuples premiers.
Civilisations des quatre coins du monde
© musée du quai Branly, photo Nicolas BorelCe qui nous amène à nous poser la question de ce mot de « premier » qui a aussi causé polémique. Est-ce que premier est une façon de parler de peuple primitif sans le dire ? Une façon de poser une échelle de valeurs entre les cultures du monde entier et nous ? Comme une distinction entre nous et les autres ? Parce qu'il est difficile de voir une ressemblance entre les peuples polynésiens du XIXème siècle, les Amérindiens du XVIIème à nos jours, le Cameroun contemporain... Mais cet aspect hétéroclite du Musée est aussi une de ses forces. Découpé en 4 grandes régions (Afrique, Amériques, Asie et Océanie), il permet d'aborder des civilisations largement méconnues par le grand public plus habitué aux objets grecs ou romains qui inondent généralement les musées. Et de constater que ces « arts » n'ont rien de primitifs et sont au contraire d'une finesse, d'une complexité remarquables. Ainsi le visiteur pourra se rappeller pendant longtemps cet énorme palanquin dans la partie asiatique, ou cette étonnante collection de masques du monde entier. Ces masques marquent de leur identité le Musée du Quai Branly : il en existe pour toutes les étapes de la vie, pour tous les cultes et dans toutes les cultures présentées au Quai Branly. Du simple masque de théâtre de l'Île de Java au masque protecteur papou, du masque derrière lequel se cache le sorcier africain au masque funéraire colombien. Des masques faits de bois ou de fer, de coquillage ou de dents de cochons, voire de cheveux humains. Des masques typiques d'une culture, d'un culte, au symbolisme fort. Assurément le point essentiel du musée.
Le Musée du Quai Branly est, sans conteste, vraiment marquant pour un esprit contemporain. De nombreuses cultures, que la civilisation de l'homme blanc n'a parfois pas encore éteint complètement, se dévoilent au travers de ces quelques objets, représentations vivantes d'un peuple. De nombreuses explications, parfois accompagnées d'extraits audios vois vidéos, permettent de connaître un peu plus la civilisation qui nous a « légué » telle ou telle pièce. Sans compter le désormais habituel audioguide. Du coup, explorer correctement le musée demande un temps rédhibitoire. Au bout de trois heures de visite, en abandonnant l'audioguide au bout de quelques mètres, il est parfaitement possible de profiter, par exemple, de la partie Océanie du Musée dans son intégralité, mais sans rentrer dans les détails. Testé et prouvé ! Le Musée du Quai Branly apporte un regard nouveau sur ces peuples qui vivent parfois encore aujourd'hui, en nous présentant des objets souvent symboliques. Un musée dans lequel il est nécessaire de prendre son temps... quitte à revenir plusieurs fois.