7/10La Petite Valentine ou un certain Monsieur Meier

/ Critique - écrit par Lilly, le 04/12/2005
Notre verdict : 7/10 - Une Valentine simplement plaisante (Fiche technique)

Le verbe ne sera pas long ce soir pour présenter cette pièce, certes agréable, mais sans exception notable.

Tous nos voeux au théâtre de création

Faisons d'abord hommage au Théâtre de Création, tout fraîchement inauguré, à la place de là où se nichait discrètement l'ancien Théâtre de Poche, que les Grenoblois ne manqueront pas de méconnaître... caché dans un recoin, coincé entre le Drac et le tram, à la frontière de la ville, le Théâtre de Poche vivait, vivotait, offrant son plateau bien équipé aux compagnies locales en création. Le public ne s'y attardait pas trop, l'absence d'équipe autre que l'équipe technique, certes formidable, engendrait un trou noir dans la perception du lieu à Grenoble. Jusqu'à ce qu'un théâtre de centre ville, le Rio, soit vendu, et que pour compenser cette perte et calmer les tumultes des gens du métier, la ville ne décide que le Théâtre de Poche prendrait en compte les anciennes missions du Rio. Le théâtre de Poche devient Théâtre de Création, pourvu d'un directeur, Christian Verdier, et d'une équipe administrative et technique, bien que rattaché au théâtre municipal, et doté d'une future salle de répétition. Dieu que l'histoire des théâtres municipaux Grenoblois est complexe...

Les mois de novembre et décembre sont ceux de l'ouverture de ce nouveau projet. Pour l'occasion, un festival est organisé mettant en valeur 15 compagnies grenobloises et 20 spectacles, dont celui dont nous allons tenter de peindre un rapide tableau.

Des sketches et une ambiance insolites

Le Made in Théâtre, comprenez Denis Bernet-Rollande se lance dans une série de monologues plus farfelus les uns que les autres. Adaptées de Karl Valentin, les historiettes content les péripéties de la famille Meier dans une Allemagne des années 30, absurde et profondément étrange. L'humour satirique de l'auteur, présente des tableaux extrêmement diversifiés, sur fond d'ambiance cabaret. Des pseudos discours savants sur le théâtre, une conférence loufoque sur les animaux domestiques, puces et autres cafards, le non sens de la vie après la mort et une réflexion sur les clés du paradis (mais comment Adam est-il entré au paradis, des siècles avant l'apparition de St Pierre ?), la première sortie au théâtre... autant de situations qui au travers du filtre burlesque laissent transparaître des interrogations sur la société, son faux sérieux, sa prétention à croire aux valeurs qu'elle s'est elle-même forgées.


Denis Bernet-Rollande colle parfaitement à ces rôles de femmes mondaines ou populaires, pleines de préjugés et de maximes de bon sens. Il use de chapeaux cocasses, accoutrements ridicules, expressions maniérées, moues et déplacements risibles pour pimenter le spectacle d'esprit grinçant. Il teste le travestissement de son corps, sans se déguiser en femme, mais plutôt en jouant celui qui imite de façon sarcastique une femme. A l'accordéon diatonique, un musicien lui donne parfois la réplique, mais se charge surtout de créer cette ambiance cabaret, renforcée par les tissus colorés. Quelques marches, un rideau, le décor est rapidement planté, cependant la musique et les propos permettent de ressentir assez vivement les traits de l'époque.

C'est donc une bonne soirée que l'on passe devant cette pièce, même si elle ne laissera pas un arrière goût intense. N'est-ce pas cela le théâtre aussi, prendre goût au risque, accepter qu'une pièce n'en mette pas plein les yeux, mais fait petit à petit son travail à l'intérieur de chacun, donne un plaisir calme, sans fougue, juste un sourire, sans éclat de rire.
Cela fait de la peine quand notre bon Théâtre de Poche, pardon le théâtre de Création, accueille quelques spectateurs seulement, dont 90% de cultureux.