Clémence Savelli - Interview - 24 janvier 2007

/ Interview - écrit par wqw..., le 24/01/2007

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Avant la création de son nouveau spectacle et un premier album, entretien avec une artiste en devenir qui a déjà bien les pieds sur terre.

Découverte au hasard d'un escalier de Montmartre, dans une salle minuscule (15 places assises) pertinemment appelée La Cave dans l'Escalier, Clémence Savelli, jeune auteur, compositeur, interprète, de 22 ans propose un premier répertoire marqué par une tradition de la chanson parisienne mais aussi une volonté de s'en démarquer pour proposer une alternative un peu plus personnelle. Avant la création de son nouveau spectacle et un premier album, entretien avec une artiste en devenir qui a déjà bien les pieds sur terre. Beaucoup à dire pour sa toute première interview...

Clémence Savelli
Clémence Savelli
Krinein : Pour ceux qui ne te connaissent pas, peux-tu te présenter en quelques mots ?

Clémence Savelli : Je viens de Charente (ndlr : d'Angoulême pour être exact), j'habite à Paris depuis moins d'un an. Je démarre dans la chanson et je suis venue sur la capitale entre autres pour ça.

Quel est ton parcours musical ?
J'ai appris le piano en école de musique pendant cinq-six ans, puis en cours particuliers. J'ai commencé à prendre des cours de chant plus tard, il y a deux ans...

Quels sont les artistes qui ont fait que tu as eu envie de t'orienter vers la chanson française plutôt que vers le classique ? Tu as commencé en faisant des reprises il me semble ?
En fait, la question ne s'est pas posée de cette manière. Quand j'étais plus jeune, je m'imaginais plutôt faire du rock. Puis j'ai pensé qu'il y avait moins la place pour dire certaines choses dans le rock.

C'était la possibilité de pouvoir dire des choses plus personnelles par la chanson plus que par le rock ?
Oui. Nous nous produisons dans une formation très restreinte (piano-voix) donc l'attention est vraiment plus facilement portée sur le texte. Ce qui est moins le cas dans le rock, il me semble.

Et c'est ça qui t'a donné l'envie d'avoir ton propre répertoire ?
Ce n'est pas venu très naturellement. Je pensais en être incapable. J'ai d'abord fait quelques concerts de reprises pendant un an. Dès que j'ai commencé à écrire et à composer toute seule, je me suis rendue compte que j'étais tout de suite plus à l'aise. Le premier spectacle avec mes chansons a été beaucoup plus facile pour moi que les concerts de reprises.

C'était quel genre de reprises ?
C'était très varié : Brel, Mylène Farmer, Mathieu Chédid, Barbara, etc. Mais toujours dans des arrangements piano-voix, c'était assez original même si parfois les gens ne reconnaissaient pas forcément les chansons (rires).

Enfin plutôt des choses actuelles quand même. Tu as des artistes références en chanson française ?
Qui m'influencent certainement inconsciemment... J'ai n'ai jamais eu vraiment de préférence parce que je suis très curieuse. J'ai été élevée avec Barbara, Brassens, Renaud, Ferré. Je pense que ça a beaucoup joué. C'est vrai qu'aujourd'hui je m'intéresse quand même à ce qu'on appelle la nouvelle vague de la chanson française, Miossec, Pauline Croze, Cali, etc. mais j'ai parfois du mal à me retrouver dans le côté festif de certains arrangements.

Clémence Savelli
Clémence Savelli
Ton premier spectacle s'intitule Paris-Terminus. Peux-tu nous le présenter ? Comment s'est-il mis en place ? Quel sujet abordes-tu ?

Nous (ndlr : son pianiste et elle) avions une dizaine de chansons, il y a de ça quelques mois, nous en avons écrit beaucoup plus depuis. Nous voulions éviter le concept de récital avec des chansons enchaînées ou des présentations entre les morceaux, ce qui m'aurait beaucoup déstabilisée pour mes débuts sur scène. Nous avons donc imaginé un fil conducteur, un peu à la manière d'une comédie musicale, avec des personnages vidéo et l'histoire d'une jeune provinciale débarquant à Paris : c'est vrai que souvent mes chansons décrivent des personnages de la vie quotidienne.

En concert, il y a un jeu, une véritable mise en scène entre toi, tes chansons, ton pianiste et quelques vidéos plutôt humoristiques. Tu peux nous en parler un peu ?
Au tout début, quand j'ai fait écouter mes chansons sans cette mise en scène à des gens de mon entourage, j'ai pu observer que certaines textes étaient assez pesants. Il nous a donc semblé nécessaire et original d'écrire une mise en scène qui puisse alléger un peu le contenu de certaines chansons et me permettre de me distancier parfois de tout cela. C'est vraiment Pascal (ndlr : le pianiste) qui s'est occupé de la mise en scène et comme on n'avait pas d'acteurs... c'est lui qui joue (rires).

Sur ton site (ndlr : encore en construction), on voit que tu es auteur, compositeur, interprète mais que tu as également beaucoup fait de recherches sur la chanson réaliste et la variété française. Peux-tu-nous en dire un peu plus ?
En effet, à côté de cela, je suis à la fac en DEA de musicologie. Je me suis intéressée dans un premier lieu à la variété, j'ai écrit un mémoire sur le fonctionnement de l'industrie musicale, la sociologie des publics, la construction d'une chanson de variété et le personnage qu'est le chanteur de variété etc. Cette approche me permet de prendre un certain recul sur ce que je fais et sur le milieu de la chanson. J'ai toujours trouvé cela intéressant d'avoir diverses approches. Quant à la chanson réaliste, je n'y travaille vraiment que depuis le début de l'année me demandant si on pouvait retrouver une chanson réaliste aujourd'hui.

Avec justement ce recul, ça ne te fait pas un peu peur de te lancer dans cette aventure ?
Non justement, parce qu'en ayant vraiment étudié les choses de manière objective, je pense au contraire savoir déjà à quoi m'attendre. Enfin, je veux dire par-là que je pars vraiment de ce qui pourrait m'arriver de pire pour éviter les désenchantements trop violents. Le fait de travailler sur le fonctionnement de l'industrie musicale, de savoir que le public peut-être touché de manière très aléatoire par une chanson, me permet de garder les pieds sur terre. Il y a beaucoup de choses qui ne sont pas du tout rationnelles qui entrent en jeu et cela me permet justement de prendre un recul nécessaire... ça ne veut pas dire que je ne suis pas optimiste (rires) mais je pars du principe que...

Qu'il ne va rien se passer ?
Non non, pas du tout ! (rires) Je suis une grande rêveuse, je rêve tout le temps, je crois en ce que je fais, je crois en ce que je fais avec mon pianiste. Je prends vraiment beaucoup de plaisir à faire ce que je fais donc ce que j'aimerais c'est que le maximum de gens écoutent mes chansons. Ça ne me fait pas peur de me lancer là dedans même si je sais bien que ce que je fais s'inscrit difficilement dans le système actuel.

Quel regard justement portes-tu sur la chanson française aujourd'hui ? T'en sens-tu proche ?
La chanson française de Bénabar, Delerm, etc., c'est quelque chose que je peux écouter. C'est d'ailleurs dommage qu'on les mette toujours dans les mêmes sacs alors qu'il y a des choses très différentes dans tout ça. Je ne m'en sens pas particulièrement proche dans mes chansons, mais je m'y intéresse.

On dit ça aussi parce que c'est un renouveau de la chanson française... Après les années 80 et début 90 qui étaient un peu morte à ce niveau...
Oui, je suis très contente de ce regain d'intérêt porté à la chanson à texte. Je crois que cela m'a vraiment donné envie d'écrire. Maintenant, je pense aussi qu'il y a des choses qui me manquent dans ces chansons. J'entends rarement des choses très engagées, des textes qui prennent vraiment des risques, qui prennent vraiment position sur des sujets très précis. Il y a des choses que je ne retrouve pas et qui existaient dans les chansons des générations précédentes.

Clémence Savelli
Clémence Savelli
Tu travailles actuellement sur un nouveau spectacle qui s'appelle Révolution. Tu peux nous en parler ?

Justement c'est un spectacle qui se veut un petit peu plus engagé et surtout plus détaché de ma personnalité que le premier. C'est vrai que Paris-Terminus est un spectacle aux textes relativement autobiographiques. Quand on commence à écrire et qu'on est jeune, je pense qu'il est très difficile de ne pas avoir envie de coucher sur le papier les choses qui nous touchent, qui sont très personnelles. On a besoin "faire le vide" pour continuer à écrire des chansons qui nous concernent moins. Pour Révolution, j'ai des textes un peu plus engagés, qui sont pour la plupart des portraits de société. Ce spectacle va fonctionner sur le même principe d'une mise en scène originale avec la présence de la vidéo. Je traite de sujets beaucoup plus concrets, que l'on va aussi essayer de rendre moins durs à digérer... avec encore des petits gags (rires).

Peut-on espérer un premier album cette année ?
Oui, nous allons enregistrer très prochainement mon premier album.

Quels sont tes autres projets pour 2007 ?
Je trouve que c'est déjà pas mal. Mais il est vrai que nous avons aussi un projet de spectacle en cours, avec une musique plus contemporaine de Pascal. C'est un spectacle déjà écrit, que nous n'avons pas encore répété mais que nous aimerions bien mettre en scène, avec une ambiance très mystique, une atmosphère plus contemplative.

Et faire des dates ?
Oui bien sûr ! Et faire des dates ! (rires)